Pouvez-vous
présenter votre association
Uback Concept ?
Patrice : En
1996, en premier, c'était un
collectif d'artistes, artistes qui
ont tenté de travailler individuellement,
mais ça ne s'est pas abouti,
donc ils se sont réunis pour
créer l'association. Ils ont
fait un premier mixtape, et ensuite
l'association s'est un petit peu éteinte.
Donc nous, on a repris l'association
en 1998, on veut produire des artistes,
faire un travail du début jusqu'à
la fin. Aux côtés de
ça on a des performances artistiques,
et notamment, on a le slam. On avait
envie de développer le slam
un peu à l'intérieur
de Saint Denis, c'est vrai que le
slam en France, c'est vraiment centré
sur Paris. Il y a plusieurs endroits,
il y a le slam qui circule, mais pas
dans les banlieues. Donc nous on s'est
dit qu'on va tenter de sortir ça
de l'intérieur de Paris. On
a trouvé le Café Culturel
Arts et Rencontres à Saint
Denis qui avait déjà
reçu un premier cassette d'artiste
slam, qui était Nada, et étant
donné qu'ils ont trouvé
ça plus que compétent,
on s'est réuni, et on a monté
en commun les soirées slam
là-bas.
Pourquoi
l'association s'appelle Uback Concept
?
Patrick
: Uback Concept était à
la base le nom d'un collectif hip
hop, avec des rappeurs, des djs, des
danseurs et des graffeurs, qui avait
envie de s'exposer. Ubac, c'est la
face du montagne qui est exposé
au soleil. On a ajouté le "K"
pour faire du style.
Combien
de membres compte l'association ?
Patrick
: On est quatre, donc il y a moi,
Patrick, il y a Patrice, il y a Adoff,
il y a Pierre. Il y a un président,
un trésorier, un secrétaire
et puis une quatrième personne.
On gère tous ensemble tout
ce qu'on fait dans l'association,
actuellement notre projet principal,
c'est les soirées slam. C'est
la première année, on
a fait une au mois de février,
une au mois de mars, une au mois de
mai, une au mois de juin. La dernière
de la saison, ce sera au mois de juillet,
le 6 juillet (2001). On compte pour
faire une le deuxième vendredi
de chaque mois, et donc ça
sera repris au mois de septembre.
On
décrit Saint-Denis comme étant
"le Bronx français".
Personnellement, je ne connais pas
la ville, est-ce que c'est vraiment
juste ?
Patrick
: Personnellement, je connais
pas le Bronx, mais c'est vrai que
Saint-Denis fait partie des villes
un peu "chaudes" mais sans
l'être plus que d'autres villes.
Ça craint pas énormément,
mais ce n'est pas non plus de tout
repos ! Il y a des gens tranquilles,
et il y a quelques endroits ou il
y a la "cai-ra" comme on
dit, les racailles, il y a la petite
délinquance, vols de portables
etc, mais il y a des choses positives
par la musique ou par le sport, entre
autres.
Patrice : Saint-Denis par rapport
au Hip Hop, à la base c'est
une ville où le Hip Hop a vraiment
pris une place, en 1993 avec NTM.
C'est là où en fait
le Hip Hop a émergé.
A Saint-Denis, il y a des quartiers
chauds et notamment des quartiers
qui sont pratiquement résidentiels,
et c'est notamment ces quartiers chauds
qui avaient les jeunes de la rue,
qui ont écouté de la
musique qui venait des Etats-Unis,
qui ont commencé à s'exprimer
par une autre manière entre
eux, à avoir une partie valorisant
de leur propre vie. C'est notamment
grâce à ces quartiers
que le Hip Hop a pu prendre son essence
à Saint-Denis. Mais Saint-Denis,
c'est vrai que c'est pas le Bronx,
mais c'est comme toutes les villes
dans la banlieue, il y a certains
quartiers un petit peu craignos, et
d'autres, on peut dire une majorité,
où ça va.
Que
représente NTM à Saint-Denis
?
Patrice
: En fait il y a deux versions.
Il y a le côté qui adore
NTM, et les autres qui ne les aiment
pas. Le côté qui adore
NTM et ce qu'ils ont fait, ils disent
"NTM, ils représentent
le 93, ils ont pu se développer,
avoir une carrière telle qu'ils
ont à présent, sans
avoir dû partir de la ligne
hip hop" mais il y a d'autres
qui considèrent que NTM a juste
profité d'un système,
sans avoir aidé d'autres personnes
dans la même situation qu'eux.
Et c'est vrai que NTM, il y avait
les tags et les graffs NTM un peu
partout. Il y en a beaucoup moins
à présent, dans le Hip
Hop maintenant, ce qui est beaucoup
plus représentatif, c'est le
rap, et notamment la danse qui est
en train d'émerger. Le graffiti,
le tag, c'était partout, c'était
le graffiti qui a annoncé le
Hip Hop.
Vous
trouvez que la scène Hip Hop
en France est devenue beaucoup plus
commercialise qu'avant ?
Patrick
: Franchement, c'est un problème
qui est de plus en plus compliqué,
maintenant tu vois, il y a la frontière
entre underground et commercial, qui
est soit très net, soit flou,
selon les cas ! Et donc, si tu veux,
tu as des bons groupes, on ne peut
pas dire vraiment que le rap français
est un peu perverti par le côté
business et tout ça. Moi je
trouve que dans un sens ça
l'a un peu fortifié, c'est
plus professionnel, tu vois ? Dans
le sens où ça a permis
à des jeunes issus des banlieues
comme nous, même les jeunes
de Paris, d'apprendre des choses,
d'entamer une carrière, de
monter des sociétés,
de monter leur propre truc. En tout
cas, ça a permis a des gens
de se prendre en main. Mais d'un autre
côté, il y en a qui profitent
uniquement du côté argent,
sans rien calculer à côté.
Effectivement, il y a six ans, je
me disait "oui, l'argent commence
un peu à pourrir le rap, tu
as plus en plus de rappeurs".
Mais après, depuis peut-être
trois ans, je me dis "ça
a quand même permis à
faire pas mal de choses.". C'est
juste une évolution.
|