Rencontre avec Jonone

 



 

A quoi penses-tu lorsque tu peins ?

Des fois, je pense à des idées car mon travail est abstrait, je pense beaucoup aux tendances des couleurs, de ce que je vais faire. Tu vois ici, il y beaucoup de dessins, de matériel, car j'ai déjà l'idée de ce que je veux faire. Ce n'est pas par hasard que j'utilise ce type de peinture, d'aquarelles ou de pinceaux. Je connais d'avance la manière dont je vais mettre mon travail en valeur, après il suffit simplement le faire.

Tes peintures sont très gestuelles comme dans les courants "Action Painting" ou "Modern Abstract", pourquoi mets-tu, toi aussi, en avant la liberté du geste ?

Ca vient de mon esprit, ça s'appelle "freestyle" : tu fais ce que tu veux. Avant, quand j'essayais de faire des caractères, des lettrages, je me faisais chier grave, je me sentais comme un mec qui attend le métro pour aller au boulot. Je me disais : "Putain, pourquoi je ne peux pas faire ce que j'ai envie de faire ? Pourquoi je dois me prendre la tête pour faire un caractère ou une lettre parfaite ?!!". Je me disais qu'il y avait déjà des mecs qui faisaient ça comme Sin, Doster et bien d'autres et que si je faisais les mêmes choses qu'eux, je ne n'y arriverais jamais. Je voulais être libre de faire ce que je voulais. Au début, c'était marginal de faire du graff et j'étais marginal dans le monde des graffeurs.

Et dans le monde des toiles ?

Dans le monde des toiles, j'étais un peu plus apprécié, car je faisais avant tout un vrai travail artistique. Ce sont des choses dont je rêvais depuis que j'étais petit : les artistes, les ateliers. Ce monde là est très important pour moi.

Pour toi, la vie c'est la peinture ?

Oui, peindre "is everything" (peindre est tout, NDLR), c'est essentiel ! Mon entourage est composé d'artistes, de beaucoup de peintres qui ne parlent que de ça.

Pourrait-on dire que tes peintures sont une image de toi, une partie de toi ?

Oui, c'est pour ça que je continue à peindre. En peignant je me retrouve moi-même car je suis quelqu'un de perdu dans la vie. Avec toutes ces nouvelles tendances, toutes les saisons, il y a de nouvelles choses à porter. C'est toujours nouveau, ça va toujours plus vite, et je suis perdu dans ce monde dans lequel nous vivons. Moi, j'achète n'importe quelles baskets et les gens me disent "Ah ! Oui c'est baskets-là sont de telle marque et patata…". J'ai le sentiment de me retrouver, car tout le monde essaye de te changer : "Mais pourquoi tu ne commences pas à faire des installations vidéo, à faire ceci, cela ?". Dans la vie c'est très dur de rester sur son chemin. Les gens te disent : "Ceci est à la mode, cette boutique Colette, et la galerie truc", on te dit ça et toi tu es dans ton coin, peut-être tu te reconnais, peut-être pas, ou tu es peut-être tout seul. J'essaie de faire avec les choses que j'ai, et pas avec les choses dont je rêve.

Récemment tu as exposé dans quatre lieux différents, combien de toiles as-tu peins pour ces expositions ?

J'avais une trentaine de dessins et vingt-cinq toiles.

As-tu réalisé une série ?

Non, c'est une accumulation de mon travail.

Tes toiles ne font donc pas partie d'une série, mais elles ont pourtant une diversité qui leur est propre. D'où vient cette diversité ?

Lors de mes expositions, j'essaye de mettre des toiles récentes mais aussi des toiles d'autres périodes avec une énergie différente. Par exemple, cette toile que je fais en ce moment (il montre une toile posée au sol), elle n'a rien à voir avec celle-là. Il y a une référence avec ces petits points que j'ai fait, mais ce n'est pas la même énergie. Cette toile, je l'ai commencé à New York dans un studio, et elle a toute une histoire car je l'ai faite à New York et quand je suis là-bas je me sens bien, alors je fais de belles toiles.

Tu peins mieux à New York qu'à Paris ?

En ce moment, oui.

Pourquoi ?

Parce que j'y retrouve mes racines, et mon ami a un beau studio qui donne sur un pont - c'est à Brooklyn - il y a de la musique, c'est cool ! Je pars là-bas pour trois semaines, et je peins tous les jours non-stop.

Le lieu où tu peins est-il important ?

Oui, ça influence beaucoup mon travail.

 

 

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