Le film SCRATCH et ses dj's

 
 


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Doug Pray accorde une place privilégiée à la parole, ce qui permet ainsi de revenir assez souvent sur des clichés qui collent à la culture Hip Hop. Jazzy Jay, par exemple, explique au début du film que le Hip Hop a converti nombre de jeunes dans les années 80, que des bagarres de rue, ils sont ainsi passés au breakdance, puis derrière les platines et qu'en cela la culture Hip Hop véhicule des idées et des valeurs positives.

Les explications viennent des propos des dj's eux-mêmes, recueillis au cours de nombreuses interviews. Didactisme n'est ici pas du tout synonyme d'ennui, au contraire, la mise en scène dynamique de "Scratch" et la bande-son permettent au spectateur de plonger dans l'univers des dj's.
Doug Pray étoffe les séquences d'interviews par des séquences live. Chaque propos est illustré par un plan : un dj parle d'une figure de style, on le voit immédiatement à l'œuvre aux platines dans le plan suivant. MixMasterMike et Q-Bert nous explique leurs dernières trouvailles, démonstration aux platines à l'appui.
On retiendra quelques passages savoureux : DJ Shadow explorant la cave d'Amoeba Music, fameux disquaire de San Francisco, entouré de centaines de milliers de vinyles où il fait preuve d'une humilité remarquable lorsqu'il confie qu'il sera très probablement tombé aux oubliettes d'ici une dizaine d'années et que, pour cela, il se doit de respecter les œuvres des artistes oubliés qu'il recherche lors de séances de "digging" forcené. Ou bien encore Roc Raida qui, lors d'une battle, scratche avec chaque partie de son corps, tel un pantin génial désarticulé en parfaite symbiose avec ses platines.
Le film vaut par plusieurs qualités : le plaisir de voir l'histoire du Hip Hop racontée par ceux qui l'ont fait, le plaisir de faire de la musique et de la transmettre à un public dans un esprit festif. Devant nos yeux s'affiche sans complexe une culture riche et vivante qui se transmet aussi aux générations suivantes (d'ailleurs très prometteuses d'après les démonstrations que l'on peut voir dans le film), Babu tenant d'ailleurs à préciser que nous ne sommes qu'aux débuts de la culture Hip Hop
On apprécie également l'humilité de dj's tels Craze ou Shadow qui sont pourtant, tout du moins pour ce dernier, des artistes mondialement connus. Beaucoup d'humour, ne se prennent pas au sérieux.


Par manque de temps, hélas, Doug Pray n'a pu intégrer les artistes européens (on regrette aussi l'absence des Scratch Perverts par exemple) ou les femmes à ce documentaire, seule Shortee (Faust and Shortee) est présente. Qu'à cela ne tienne, on espère bien un second volet tout aussi passionnant dans les années à venir.

"Scratch" est un film dense mais suffisamment didactique pour permettre au spectateur non-initié de trouver des repères, des clés pour comprendre le deejaying, et par delà ce qu'est la culture Hip Hop.
Doug Pray a d'ailleurs souhaité réaliser son film dans cette perspective, pour faire connaître ces dj's, les faire reconnaître non seulement en tant que techniciens virtuoses, mais également en tant que musiciens, en tant qu'artistes à part entière.
Au final, on se trouve face à un film passionné et passionnant qui élève - s'il en était besoin - le deejaying au rang d'art majeur en rendant un hommage respectueux à ces sculpteurs de vinyles qui font de la culture Hip Hop ce qu'elle est depuis déjà plus de vingt ans. Un film absolument indispensable dont la sortie prochaine en DVD devrait combler les fans.

 

Guizmo - Mai 2001
 
 

Bill Laswell - "Scratch" [Transparent Music, 2002]
Cut Chemist - "Live At Future Primitive Sound Session"
[Future Primitive Sound, 1998]
DJ Shadow - "Endtroducing"
[Mo Wax, 1996]
Faust and Shortee - "Digital Soul"
[Stray Records, 2001]
MixMasterMike - "Anti-Theft Device"
[Asphodel, 1998]
Q-Bert - "Wave Twisters"
[Galactic Butt Hair, 1998]
Rob Swift - "The Ablist"
[Asphodel, 1999]
The Allies - "D-Day"
[Asphodel, 2000]
X-Ecutioners - "X-Pressions"
[Asphodel, 1997]